










Introduction Une révolution silencieuse est en cours dans l'industrie cinématographique et télévisuelle africaine. L'arrivée en force des géants mondiaux du streaming comme Netflix, Amazon Prime Video et Disney+, ainsi que l'émergence de plateformes locales robustes comme Showmax, a complètement changé la donne pour les créateurs du continent. En commandant et en finançant des séries et des films originaux, ces plateformes offrent des budgets plus importants, une qualité de production accrue, et surtout, une distribution mondiale instantanée, permettant aux histoires africaines de toucher un public comme jamais auparavant.

<h2>Une montée en gamme spectaculaire</h2> L'investissement des plateformes a entraîné une professionnalisation et une montée en gamme de toute la filière. Des séries comme "Blood & Water" (Afrique du Sud), "Far From Home" (Nigeria) ou "Le Sang de la Cité" (Sénégal) bénéficient de standards de production (scénario, image, son, post-production) qui rivalisent avec les productions internationales. Cette exigence de qualité a un effet d'entraînement sur tout l'écosystème. Elle crée une demande pour des scénaristes, des réalisateurs, des directeurs de la photographie et des techniciens hautement qualifiés, stimulant ainsi les industries locales et favorisant la formation. Les créateurs africains ont désormais les moyens de réaliser leurs ambitions, sans avoir à faire de compromis sur la qualité faute de budget.
<h2>La diversification des récits</h2> Peut-être plus important encore, le modèle de la SVOD (vidéo à la demande par abonnement) offre une plus grande liberté créative. Contrairement aux chaînes de télévision traditionnelles, qui doivent plaire au plus grand nombre et attirer les annonceurs publicitaires, les plateformes cherchent à satisfaire des niches et à fidéliser leurs abonnés avec du contenu original et audacieux. Cela permet aux scénaristes africains d'explorer des genres et des thèmes plus variés et plus complexes. On voit ainsi émerger des thrillers politiques, des séries pour adolescents, des films de science-fiction ou d'horreur, qui s'éloignent des récits postcoloniaux ou des comédies sociales qui ont longtemps dominé la production. Ces nouvelles narrations présentent une Afrique moderne, complexe et plurielle, loin des clichés.
<h2>Showmax et la concurrence locale</h2> Face aux géants américains, la concurrence locale s'organise. Showmax, propriété du groupe sud-africain MultiChoice, est un excellent exemple de plateforme qui mise sur une connaissance fine des marchés locaux. En produisant du contenu hyper-local dans différentes langues africaines (swahili, zoulou, yoruba...), Showmax parvient à créer une connexion plus forte avec son public. La plateforme a également un rôle clé dans la diffusion d'événements sportifs et de "telenovelas" locales, qui sont extrêmement populaires. Cette concurrence est saine, car elle pousse tous les acteurs à investir davantage dans la qualité et la diversité des contenus.
<h2>Les défis de la souveraineté culturelle</h2> Cette nouvelle ère n'est pas sans poser de questions. La domination des plateformes américaines soulève des enjeux de souveraineté culturelle. Leurs algorithmes et leurs décisions éditoriales, souvent pris depuis Los Angeles, peuvent influencer le type d'histoires qui sont produites, favorisant des récits qui correspondent à une certaine vision "exportable" de l'Afrique. De plus, la question de la juste rémunération des créateurs et de la détention des droits de propriété intellectuelle est un débat crucial pour que la valeur créée profite durablement à l'écosystème local.
Conclusion L'irruption du streaming est une opportunité historique pour le cinéma et la télévision en Afrique. Elle a débloqué des financements, élevé les standards de qualité et fait exploser la visibilité des créateurs du continent. Le défi pour les années à venir sera de construire sur cette lancée un écosystème durable et souverain, où les talents africains ne sont pas seulement des prestataires pour des plateformes étrangères, mais les maîtres de leurs propres histoires et de leur propre industrie.